Affaire Seznec : Pourquoi l'hypothèse d'une arnaque de Leon Turrou est impossible
On peut dire que j'ai beaucoup beaucoup travaillé sur le cas Leon George Turrou...
Et que je n'ai pas ménagé ma peine.
J'ai lu tout ce qui a pu paraître sur lui.
Les livres comme les articles de journaux.
En anglais et en français.
Me reste encore "Bonheur en sursis" et j'aurais lu tout
Et, curieusement, à partir des mêmes documents, nous arrivons à une analyse complètement différente.
1/ L'annonce déclenchante
Tous les aficionados de l'affaire Seznec savent bien que ce qu'on nomme "l'annonce déclenchante" n'a jamais été l'annonce Bollon :
Annonce Bollon parue dans La Dépêche de Brest le 22 novembre 1922
Que vient donc faire cette annonce O.I.R. parue dans L'Auto des 7 et 9 février 1923 ?
Qu'est-ce qui nous prouve que Seznec ou Quémeneur lisaient bien L'Auto ?
Tout le monde lisait le journal L'Auto car c'était le journal d'annonces automobiles le plus suivi par tous les professionnels
Lors des perquisitions à Traon ar Velin (Morlaix) ou à Ker Abri (Landerneau), aucune recherche n'a été faite pour retrouver les journaux.
Qu'est-ce qui nous prouve que c'est bien Leon Turrou qui se cache derrière le sigle O.I.R. ?
Leon Turrou est l'américain Charly et il cherche a se procurer des Cadillac.
2/ Leon Turrou était-il en France en mai 1923 ?
Nous sommes en possession de deux seuls documents qui pourraient le prouver :
Le premier document : une liste de passagers du paquebot Paris, montre que Turrou, sa femme et ses fils ont débarqué à New York le 25 mars 1923.
Nous savons qu'ils venaient de Russie où Turrou avait fini par retrouver sa famille.
"Upon his arrival in Moscow Turrou made inquiries about the fate of his family. He learned that they were alive and well. They were reunited and on July 13, 1922, Teresa was issued an emergency U.S. Passport in Warsaw, Poland. Turrou and his family returned to America in March 1923 where they settled in Westbury, Long Island, New York. He found work as a salesman and later as a Postal Inspector in New York City."
Ils ont, bien entendu, traverser la France pour gagner Le Havre.
Mais combien de temps y ont-ils séjourné ?
Rien n'est moins sûr.
Il y avait des trains spéciaux pour l'embarcation sur les paquebots :
"Certains passagers étaient arrivés l’après-midi même de Paris, par train : le New York Express, en provenance de la Gare Saint-Lazare."

Le second document : une liste de passagers du paquebot Berengaria, montre que Turrou a débarqué seul à New York le 13 juillet 1923.
Là aussi, il a, bien sûr, traversé la France pour arriver à Cherbourg en provenance de Monaco.
Rien ne prouve qu'il ne s'y soit pas arrêté.
Et il est totalement possible de trouver une liste de passagers montrant son arrivée en France à bord du Berengaria le 21 mai 1923.

J'en suis arrivée à penser qu'il avait dû débarquer quelque part avec une mission de l'A.R.A. (American Relief Administration) pour lequel il était traducteur de 1921-1923.
3/ Turrou, était-il oui ou non le roi de l'arnaque ?
Là aussi, il faut se remettre dans le contexte, Leon George Turrou est brillant, très brillant.
Il parle plusieurs langues : Anglais, Allemand, Français, Russe et Polonais.
Comme l'indique Bertrand Vilain, dans son livre, affaire Seznec, Les archives du FBI ont parlé, iIl a été interprète pour les pontes de l'A.R.A. en Russie soviétique d'octobre 1921 à février 1923. Et, par son job, il a rencontré des hauts dignitaires bolcheviks, dont Felix Dzerjinski.
C'est effectivement Bertrand Patenaude qui en parle dans "The Big Show in Bololand".
Que j'ai aussi par-devers moi.
Alors que Seznec nous décrivait Charly, je rappelle ici que notre Turrou avait les pommettes hautes distinctives des slaves. Et qu'il était plutôt du genre blond.
A ce sujet, le brillant dernier auteur peut bien se moquer de mon américain...
Je suis sensible aux critiques sur Turrou, car, ici, j'ai eu ma dose.
Leon Turrou avait très très envie d'intégrer le F.B.I.
Et il s'en est donné les moyens.
Sa jeune et brillante carrière parlait pour lui.
Hoover l'a intronisé agent spécial le 16 mars 1929.
"Herbert Hoover was inaugurated President on March 4, 1929. On March 16 Director Hoover notified Turrou of his appointment as a Special Agent."
Le directeur du F.B.I. c'est J. Edgar Hoover qui n'a aucuns liens familiaux avec le président Herbert Hoover.
Alors...
Pourquoi ne pas prendre pour dires véridiques les paroles d'un certain Joseph Davidowski ?
"It may be noted further that MR. POWER said that Davidoff has been drinking when he made this statement…"
Vous imaginez un peu la différence de carrière entre un Davidowsky tenancier d'un pub mal famé dans le quartier déshérité de Brooklynet d'un Leon Turrou, espion connu à l'international, dont même le très hollywoodien Jack Warner a fait un film avec starring Edward G. Robinson.

Pour en finir….
Quand on lit :
"Bertrand Vilain l'affirme : "Il existe, dans les archives de la préfecture de police de Paris, un dossier N° 16707, datant de 1939, au nom de Leon Turrou". Une piste encore inexplorée."
C'est ce que j'appelle le syndrome de la carrière internationale de Turrou qui a vraiment démarré, après l'affaire Seznec, en 1929. Pas avant.
Mais il est tout à fait normal que les archives de la préfecture de police de Paris aient un dossier au nom de Turrou D'une part parce qu'il était un agent connu du F.B.I.
Et d'autre part, parce qu'il était venu en France en juillet 1939, pour la campagne de lancement du film d'Anatole Litvak "Confessions d'un espion nazi".
4/ Turrou et Quémeneur
Rien ne peut venir étayer la thèse selon laquelle Turrou et Quémeneur ne se connaissaient pas
Rien non plus pour nous dire que Turrou n'était pas le Charly de l'affaire Seznec.
5/ Le retour de Pierre Quémeneur à Morlaix le dimanche 27 mai 1923
Petit-Guillaume nous a tardivement parlé de son cher papa bagnard.
Objectif en 1978 : aider son neveu Denis Seznec dans sa nouvelle demande de révision du procès du grand-père...
Qu'il faut y apporter quelques crédits.
Oui, moi aussi, je le reconnais, les fils de Petit-Guillaume m'avaient émue.
Mais, l'émotion une fois passée, j'ai su très vite raison garder.
Hors le fait qu'il est totalement possible que Quémeneur soit resté pendant 6 heures, assis sur sa valise, en gare de Houdan, à attendre le train de Paris...
Vous pensez bien qu'avec les charmants voisins des Seznec à Morlaix, toujours planqués derrière leurs rideaux à espionner...
Un conseiller général du Finistère dans les rues à 6 heures du matin, ça aurait fait jacter !
Michel Pierre a essayé d'écarter cette thèse d'un trait de plume en demandant comment Pierre Quémeneur pouvait avoir sur lui, le dimanche 27 mai 1923, une promesse de vente établie entre le 22 mai 1923
Je vais faire parvenir cet article à notre grand reporter morlaisien du Télégramme.
Parce qu'il a fait du tout un bon travail de journaliste.
Il a juste écrit Il a le droit, me direz-vous...
Peut-être, mais moi aussi j'ai le droit de remettre les pendules à l'heure.
Le problème de M. Vilain est que dès qu'il trouve une archive américaine, intéressante sur l'affaire Seznec, il s'efforce immédiatement de la faire coller.
Nous l'avions vu avec son livre "Affaire Seznec : Nouvelles révélations" paru suite à sa découverte des pages du livre "Cadillac Participation in the World War"

Où il nous apprenait qu'il n'y avait jamais, ô grand jamais, eu un vaste trafic de Cadillac en France vers la Russie des soviets en 1923...
Et nous apprenait que Pierre Quémeneur avait été enterré dans l'Orne, à La Ferrière-Bochard.
Nous le voyons aujourd'hui, avec Patenaude et le dossier Turrou du FBI, où il nous apprend qu'il y a bien eu une affaire de Cadillac en France vers la Russie des Soviets en 1923.
Et où Petit-Guillaume nous dit que Pierre Quémeneur a été enterré à la scierie Seznec de Morlaix.

Pour choisir, cochez la case correspondante.
Merci.
Leon
George Turrou (Turovsky), a Polish-born naturalized American citizen,
attained notoriety in 1938 with his surprise resignation from the
Federal Bureau of Investigation (FBI). The circumstances of his
resignation, the angry response of FBI Director J. Edgar Hoover, and
Turrou’s involvement in a sensational espionage case were front page
news for months. Turrou went on to write a series of newspaper articles
and a book about the case. Warner Brothers Studios hired him as
technical advisor on a major motion picture adapted from his book. This
became the first movie to depict Nazi Germany as America’s enemy. It is
credited with helping turn public opinion against Hitler and neutrality.
Turrou enjoyed a period of celebrity as a lecturer and writer but
Hoover actively blocked his return to Government service. He answered
all inquiries from prospective employers with derogatory comments. FBI
agents filed reports on Turrou’s activities. In 1943 Turrou enlisted in
the U. S. Army as a private soldier, eventually achieving the rank of
Lieutenant Colonel. After WWII Turrou settled in France and became a
leader in the American veteran expatriate community. He also was
employed by J. Paul Getty as his personal security chief. In 1965 Hoover
ended his vendetta by removing the dismissal “with prejudice” entry
from Turrou’s records. However, the FBI continues to describe Turrou as a
bungler and oath-breaker in its official history.
Turrou
was born in Kobryn, Russia (later Poland, now Belarus). He was orphaned
as an infant and adopted by a wealthy tradesman. He spent much of his
youth travelling around the world living in Egypt, India, China, Japan
and Australia. He attended schools in Warsaw, Cairo, St. Petersburg,
Vladivostok, Berlin and London. On March 12, 1913 Turrou arrived at
Ellis Island aboard the SS Bremen. In New York he sold newspapers and
did various odd jobs. In 1916 he left for France and joined a Polish
unit of the French Foreign Legion. While recovering from battle wounds
in a Paris hospital he met Teresa Zakrzewski, from Zahacie, Poland (now
Belarus). He followed her to China, where she, at that time, lived with
her parents, and married. They had a son, Edward, in 1918. Turrou was
hired by the Chinese Eastern Railway as a translator and Theresa, whose
parents had gone to Siberia, went there to give birth to their second
child, Victor (1919). Turrou remained in China.
In
the chaos of the Russian civil war, Turrou became separated from his
family. With the border closed he was unable to communicate with
Theresa. His inquiries at the American Counsel indicated everyone in the
little village where she was living had been massacred by the
Bolsheviks. Turrou gave his family up for dead. He decided to return to
the United States. For a time he worked as a salesman but on April 20,
1920 enlisted in the US Marine Corps. While a Marine he petitioned to
become a naturalized US citizen (April 29, 1921), at the same time
changing his name from Turovsky to Turrou. He was assigned to USMC HQ in
Washington, DC where he translated documents for the Historical
Section. Later he was selected for a special mission in France and
Belgium to map battlefields where Marines had fought. One of the
officers he worked for in Europe, Captain Lemuel C. Shepherd, Jr. wrote
him a testimonial. (Shepherd later became USMC Commandant, 1952- 1955.)
Turrou was discharged in May 1921 for disability, “not in the line of
duty and not as result of misconduct, character excellent”. He returned
to Europe and joined the American Relief Administration (ARA) serving in
Soviet Russia as a translator (chiefly in Moscow) from October 1921
until February 1923.
Upon
his arrival in Moscow Turrou made inquiries about the fate of his
family. He learned that they were alive and well. They were reunited and
on July 13, 1922, Teresa was issued an emergency U.S. Passport in
Warsaw, Poland. Turrou and his family returned to America in March 1923
where they settled in Westbury, Long Island, New York. He found work as a
salesman and later as a Postal Inspector in New York City.
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